Ce samedi Jérémy Thouin va mettre un terme à 23 ans de carrière dans le handball. Celui qui a joué à Monaco, Villeneuve-Loubet et au Bâtiment Nice, tire le bilan avec émotion.
« Ça me travaille dans la tête depuis quelques temps. Déjà, le week-end dernier, ce n’était pas évident. Mais, lorsqu’à l’entraînement, tu as le coach qui explique à l’équipe qu’il ne faut rien lâcher lors du dernier match, notamment parce que j’arrête et bah… Quand tu l’entends, c’est curieux. » A 36 ans, Jérémy Thouin, pivot et capitaine de la Nationale 3 du Bâtiment Nice, va mettre un terme à sa carrière ce samedi soir, lors de la réception d’Avignon aux Eucalyptus.
Des petits soucis de genoux rencontrés il y a quelques années à Monaco, de la fatigue, une perte de puissance malgré tout compensée par l’expérience et surtout une princesse d’un an et demi qui grandit de jour en jour, l’ont poussé à refermer ce chapitre de sa vie. Autre raison et pas des moindres, un déménagement à La Gaude, dans l’arrière pays niçois. Pour lui qui travaille dans le centre ville de Nice, avec un gymnase pour s’entraîner à l’ouest, les kilomètres et la fatigue seront compliqués à gérer. Fin.
L’histoire aura débuté en 1992. Tient tient Barcelone 1992… A ses treize ans, un prof d’EPS, dont il deviendra un futur collègue, lui fait découvrir le handball. La scène se passe dans la région nantaise. Du coup, emballé par ce sport mais aussi entraîné par les copains, il prend une licence à l’ASC La Montagne. Après une entente en -18 ans avec le CJ Bouguenais, il va jouer une saison en senior à La Montagne en Régionale. Enfin, il est contacté par Bouguenais pour intégrer le groupe senior : il y restera onze ans. Résultat, direction la Nationale 3. Il y jouera plusieurs saisons et même en Nationale 2 quelques temps avant que l’équipe ne redescende.
« Deux nuits à l’hôtel en déplacement »
L’échéance de la mutation professionnelle arrivant, il se retrouve face à deux choix : Paris ou la Côte d’Azur. Direction Nice. « Avec ma femme, on ne connaissait rien du tout ici mais on savait qu’on allait pouvoir profiter de beaucoup de choses. C’est une belle région et on adore la nature. » C’est tout d’abord Monaco, pour deux saisons, à l’époque en Nationale 3, qui va s’attirer les faveurs du garçon. « La première année a été difficile car nous étions cinq mutés. Alors, un turn-over, pas toujours cohérent, a été mis en place par le coach pour que chacun puisse jouer. » Seuls trois mutés peuvent être alignés sur une feuille de match.
Puis, direction Villeneuve-Loubet, pour jouer avec la Pré-Nationale, mais il aura aussi le plaisir d’être sélectionné cinq fois avec le groupe de Nationale 1. « J’ai découvert à ce moment là les départs en déplacement le vendredi, deux nuits à l’hôtel, pour rentrer le dimanche. Sympa. Je n’avais aucune prétention d’avoir du temps de jeu en Nationale 1. Mais, ponctuellement, j’ai été appelé. J’ai toujours dis au coach que s’il avait besoin, j’était là. » C’est d’ailleurs à Villeneuve-Loubet qu’il va rencontrer le joueur, plutôt le gardien, qui l’a le plus impressionné durant sa carrière : Maziane.
Au final, via les réseaux sociaux, il prend contact avec Raphaël Gallice, entraîneur l’an passé du Bâtiment Nice. En effet, pour la dernière année de Villeneuve-Loubet avant la faillite, les dirigeants avaient réalisé un recrutement douze étoiles : Thouin n’y avait plus sa place. Alors, sous les ordres de Gallice, puis de Vouillot cette année, où il a été promu Capitaine, le robuste pivot vient de disputer deux saisons en Nationale 3. « J’ai signé là bas car j’y ai retrouvé ma philosophie. Un club plus familiale, sans chichi. Après Monaco et Villeneuve-Loubet, j’ai bien aimé. »
« La jeune génération est plus individualiste »
« Bien entendu je ne peux pas avoir les mêmes affinités que j’ai pu avoir en onze ans à Nantes, mais, en toute simplicité, j’ai vécu deux belles années. J’ai bien apprécié que Xavier me face confiance pour porter le brassard. J’ai passé une belle dernière saison et je préfère arrêter maintenant que sur une blessure ou une saison où on te fait comprendre que tu dois arrêter. Ca fait deux ans que je parle d’arrêter mais je suis fier d’avoir passé cette dernière saison ainsi tant sur le terrain que dans la vie du groupe. Arrêter ne m’empêchera pas d’aller les voir de temps en temps. »
De son aveu, c’est ça qui va le plus manquer à Thouin. La vie de groupe extra-handball. Les déplacements joyeux, chantants et arrosés qu’il a connu tout au long de sa carrière, moins depuis quelques temps. « Sans être de mauvais garçons, la jeune génération est plus individualiste. Avant, en déplacement, nous n’avions que nos histoires à raconter pour faire passer le temps. On réécrivait l’histoire du hand, entrecoupé d’anecdotes bien pourries. Aujourd’hui, dans le car, les gars montent avec leurs écrans, smartphones et autres tablettes et les casques sur les oreilles. C’est différent. Au resto d’après-match c’est pareil. Sur douze gars, tu en as huit sur le téléphone. Et ce type de comportement. inévitablement, découle sur le terrain. »
« Les gars vont moins se mettre minable pendant le match pour le voisin. C’est plus individualiste, sans le vouloir pour autant, mais ça se fait naturellement. Le handball est un sport collectif et justement il perd de son côté collectif. Pour les jeunes, la remise en question est plus dur. Et puis aujourd’hui, quand tu es jeune, tu as l’impression que tout est acquis. Tu ne comprends pas pourquoi, des fois, tu dois te taper huit heures de car pour ne jouer que deux ou trois minutes. Moi, j’ai appris comme ça. Au début de ma carrière, j’étais le plus nul de mon équipe. J’ai galéré des mois voir des saisons pour m’imposer en Nationale 3. »
« Une équipe de petits cons »
Malgré tout, « dans cette équipe de petits cons capables du meilleur comme du pire« , Thouin a pris beaucoup de plaisir pour sa dernière année et c’était son souhait. « Avec nous, c’était impossible de pronostiquer. C’était dur pour Xavier à gérer. On arrive à se transcender pour les gros matchs, en même temps de passer aux travers face aux petites équipes. Sur les matchs retours, on a souffert, notamment avec le départ de Guillaume Charlier. On a recommencé à tourner à neuf joueurs. Nous étions moins sur la base arrière. Malgré tout, comme le week-end dernier où on perd 38-30 chez le leader Aix, personne n’a triché. On a répondu présent face à une énorme équipe d’Aix. »
« Je suis fier des gars. Ça fait plaisir », déclare à www.magsport06.fr, l’arrière gauche de formation, qui a du traverser une grave blessure en 2004. De retour à la compétition à Bouguenais, on lui a demandé de dépanner au poste de pivot. Il ne l’a plus quitté. Ce fervent supporter du FC Nantes gardera en mémoire un souvenir en particulier. Il y a dix ans, son club, alors en Nationale 2, avait affronté une D2 de la région parisienne en coupe de France devant une salle archi-comble de 800 personnes. « Il y en avait partout. Une ambiance de folie et on perd d’une but. Pourtant, nous avons le ballon pour égaliser. Un gros souvenir. »
Des souvenirs, au Bâtiment Nice, ont complété sa collection. Son vœu le plus cher est de garder de forts liens avec les garçons qu’il a côtoyé aux Eucalyptus. Il s’est promis de les supporter et même, si l’occasion se présente, de pourquoi pas donner un coup de main au club, d’ici un ou deux ans, en entraînant par exemple une équipe de jeunes. Sa profession de professeur d’EPS lui a déjà inculqué les bases de la direction. Son capitanat également. A suivre… D’ici là, ne soyez pas surpris si vous le croisez en pleine rendonnée en montagne : il sera à la recherche d’autres sensations.
(Crédit photo : Magsport06)
Voir plus d'articles de la même catégorie