Epilogue. La Finlande, au premier tour du Groupe II (3e Division) de la Coupe Davis, est venue battre Monaco, 3-2. Bilan du week-end avec l’entraîneur national monégasque, Guillaume Couillard.
Guillaume, peut-on dire que Monaco a été battu par un seul joueur, Jarkko Nieminen ?
On peut dire ça comme ça. J’ai trouvé que c’était un très bon Nieminen et pourtant je l’ai vu jouer une paire de fois. Je l’ai trouvé solide, impliqué, il jouait pour son pays : on l’a senti. Il est vraiment allé chercher les choses. Il a pris ses responsabilités et nous a fait mal jusqu’au bout.
Ce matin, alors que Monaco était déjà mené 2-1, Benjamin Balleret n’a pas réussi (6-1 6-2 7-6(4)) l’exploit face au 77e mondial. Que lui a t-il manqué ?
Benjamin est tombé sur un os au début. Jarkko fait une faute directe tous les deux ans. Il ne donne aucun point, ne fait jamais de faute et a été très entreprenant en début de match, avec un jeu assez offensif quand il fallait. Il a contré Benjamin quand il fallait. Quand Ben allait au filet, hop Jarkko te sort un passing, te relance une balle de plus : très efficace. Benjamin a fait ce qu’il a pu. J’ai senti Nieminen plus en confiance que vendredi : plus libéré. Donc ça fait 6-1 6-2, il a évolué tout proche de son meilleur niveau je pense. Benjamin a été vaillant, il s’est accroché et a continué à chercher les choses. Il a essayé de monter un peu plus, d’être agressif un peu plus tôt, à varier, à casser le rythme, à jouer plus haut sur le revers de Nieminen etc… Et puis il y avait la fatigue aussi. Nieminen a aussi beaucoup joué. Le double a été long. Alors il fallait s’accrocher.
La rencontre aura t-elle pu basculer au troisième set ?
Ben réussi à se détacher en menant 5-3. Et puis ça se joue à rien… Comme le double… A un ou deux points. Jarkko est tellement bon dans les moments importants : c’est fou. Il va chercher les choses et te sort des coups de folie. Il sert bien et retourne mieux : hallucinant. Benjamin peut le gagner 6-3 mais on passe à 5-5 puis 6-6. C’est très serré, les jeux, les points, tout. Dans le tie-break, Nieminen commence à faire des mouvements avec sa jambe : les crampes arrivent. Il faut tenir car dans un quatrième set ça peut tourner. Mais le mec réussit des coups de dingue. Dans le jeu à 5-5 il doit te sortir six ou sept lignes. Rien à faire. Ça fuse. La chance sourit aux audacieux. Il n’a pas été treizième mondial par hasard. Mais c’est le type de gars qui sont encore plus forts quand il y a de plus en plus de pression : ils connaissent. C’est comme Federer et Djokovic qui te sortent des points de malade dans un tie-break. Ça joue dix fois mieux.
Alors, il y a eu ce cinquième match sans enjeu et comme contre l’Afrique du Sud et la Norvège en 2014, Romain Arneodo l’a gagné 1-6 6-4 6-2 contre Henrik Sillanpaa qui n’avait pas encore joué du week-end…
Ce n’est pas évident comme concept. Romain était fatigué et émoussé. Et puis tu prends un coup quand Benjamin perd. Tu as vingt minutes pour te préparer. Mais ce type de match est très important car il offre des points au classement mondial de la Coupe Davis. ll y a huit têtes de série et nous, on est neuvième. Alors, même sur des matchs où l’affaire est pliée, il faut se battre pour redevenir têtes de série et éviter de jouer ce type de nation forte au premier tour. Et puis Romain n’a pas encore une énorme expérience en Coupe Davis alors il faut jouer à fond. Ça a mal commencé, il était emprunté. On ne saura jamais si ce cinquième match devait être décisif si c’est Micke Kontinen qui aurait joué, comme il a joué vendredi contre Benjamin. Romain se retrouve face à Henrik Sillanpaa, mais les deux Finlandais ont à peut près le même niveau. Henrik a battu deux fois Romain en Future l’été dernier en Finlande, dont une fois en finale. Romain commence mal mais plus le match avance, plus il se sent mieux. Il va vraiment chercher la victoire. Et puis, plus le match a avancé, plus le public c’est remis dedans également : une ambiance plus joyeuse. C’est bien que Romain ait gagné : important.
Tes derniers mots au sujet de ce beau week-end ?
Encore une fois, on a prouvé qu’il était compliqué de venir nous battre chez nous. On joue bien chez nous : une grosse bagarre. Si on perd, c’est toujours 3-2 : il manque un petit quelque chose. On est une vraie bande de copains. Avec le temps, Romain va devenir encore plus compétitif en Coupe Davis : il est jeune et va progresser. Il y a les autres aussi derrière qui vont venir nous aider. On a pas de regret, on a fait le maximum, ce qu’on a pu. Alors on peut toujours penser à une volée ratée en double ou autre, mais toute une carrière est faîte sur des points comme ça. On y peut rien. On a montré un bel état d’esprit, on s’est bien préparé mais on perd. On va travailler pour grappiller ces petits points qui font la différence, ce qui nous manque. On a pas à rougir, c’est le sport, même si bien évidemment on est malgré tout déçu, on ne peut que l’être avec une défaite.
En juillet prochain, pour conserver sa place dans le Groupe II, Monaco va recevoir le Maroc qui a perdu 4-1 au Portugal qui a mené 3-0. Que peux-tu nous dire sur cet adversaire que Monaco a joué il y a trois ans ?
C’est une nation expérimentée et compliquée à jouer pour plusieurs raisons. Ils ont Lamine Ouahab, qui était Algérien et qui s’est marié avec une Marocaine. Il a été 114e mondial en 2009 et possède un super talent, un peu nonchalant, mais c’est un super joueur de terre. Il a été blessé mais est en train de revenir fort (593e mondial en novembre dernier, il a gagné un Challenger à Casablanca en janvier qui lui a fait gagner beaucoup de places à l’ATP ; ndlr). Il va nous casser les bonbons. Et puis, ils ont aussi Yassine Idmbarek (759e mondial ATP qui a été 659e en 2010.) Ce mec là, il a un service à 70km/h. Il n’est pas impressionnant mais en avril 2012, quand on avait reçu le Maroc, il avait battu Benjamin en trois sets et lors du cinquième match décisif, il avait plié 7-6 au quatrième set contre Lisnard qui à l’époque était notre joueur n°1. On avait galéré comme pas possible.
Qui sera favori ?
On va se méfier de cette nation comme de la peste. On va bien se préparer, sans se sentir favori. Le seul avantage qu’on aura, c’est de jouer chez nous. Mais bon, ça sera en juillet, sur terre battue, il ferra surement très chaud et ça, les Marocains ils connaissent. On aura besoin encore une fois du public. J’espère que la tribune sera, comme ce week-end, pleine. C’était vraiment sympa : c’est rare pour du tennis.
(Crédit photo : Magsport06)
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